60 ans d’indépendance, 7 sauts-de-mouton, 3 héros et 2 bonbons

Article : 60 ans d’indépendance, 7 sauts-de-mouton, 3 héros et 2 bonbons
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30 juin 2020

60 ans d’indépendance, 7 sauts-de-mouton, 3 héros et 2 bonbons

Je suis Congolais et je ne compte pas troquer mon passeport (nous n’avons pas de carte d’identité nous). Bon, je dois avouer que je ne sais pas de quoi est fait l’avenir, là n’est pas la question. Aujourd’hui, le 30 juin 2020, mon pays célèbre ses 60 ans de souveraineté nationale et internationale. Pour un humain, cet âge rime avec une retraite bien mérité sauf que le Congo ne peut se le permettre puisque n’ayant pas souscrit à une sécurité sociale. L’indépendance dépendante, c’est ma nouvelle confidence de Kin.

La RDC c’est l’histoire d’un homme d’une procrastination légendaire. Elle remet indéfiniment à demain ce qu’elle peut bien faire aujourd’hui. D’ailleurs, son hymne national dit tout. « Nous bâtirons un pays plus beau qu’avant », une aspiration datant de 1960 qui demeure encore au futur. Un pays plus beau qu’avant, nous n’avons même pas encore tracé de plan.

60 ans d’indépendance, c’est surtout 60 années de perdues pour ma nation, ma mère-patrie qui a tout pour s’imposer comme une puissance au cœur de l’Afrique. Cet échec, nous le devons naturellement à notre classe politique. Oui, la politique, quel gâchis pour ce pays. Dès les premières heures de l’existence de cette nation, nos politiques ont tout gâché. Nos pères-fondateurs, les mêmes qui se sont battus pour arracher l’indépendance, se sont ensuite entretués. Qui ne se souvient pas de la triste double révocation de Lumumba par Kasa-Vubu et de ce dernier par le premier cité? Bref, une anarchie.

Le cordon colonial

Si sous d’autres cieux, indépendance ne signifiait pas rupture du cordon colonial, nos pères ont, eux, choisi la méthode dure. Nous avons donc hérité d’un pays grand, potentiellement riche mais sans repère aucun. Cinq ans plus tard, Mobutu entreprenait de relever ce Léopard accroupi. Mais comme souvent, l’excès de zèle est notre péché chéri. 1973, le tournant ! Les Occidentaux sont de nouveau chassés et la zaïrianisation instituée. Le pays recourt à l’authenticité pour espérer changer d’intensité.

Fort malheureusement, les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. Le Congo, devenu Zaïre, est par terre. Mobutu s’affaiblit année après année et Kabila finit par le renverser. Lumumba, Kabila et aujourd’hui Kasa-Vubu, nos héros, nos repères, depuis leurs tombes, s’interrogent certainement de leur combat pluri générationnel pour la liberté. Avons-nous vraiment compris leur idéal? Celui d’un Congo à la fois persuasif et dissuasif, c’est cette nation qu’ils ont voulu nous léguer, ils en ont laissé des plumes.

L’échec de la classe politique congolaise

Kabila père parti, le fils a passé 18 ans à chercher 15 personnes pour finir ses 5 chantiers qui pondront plus tard une révolution de modernité utopique. Puis vint Félix Tshisekedi. Il incarnait le changement mais voilà 18 mois qu’il fait du sur place tout parcourant le monde. C’est donc un éternel recommencement: des slogans creux.

60 ans d’indépendance, c’est aussi nos interminables dialogues. Un ami a même dit que nous sommes un pays de dialogues et de tables rondes et cela remonte à janvier 1960.

Oui, c’est triste, l’homme politique congolais a échoué.

Dans sa tâche de gérer, il a échoué !

Dans sa mission de montrer le chemin, il a failli !

Dans la préservation des acquis de l’indépendance, il s’est loupé !

Dans la fondation et la pérennisation d’un Etat, il nous a trahi !

Tout cela ne sont nullement des hyperboles et ne concernent pas que la classe politique passée. Oui, toutes les classes politiques qui se sont succédées dans ce pays ont un point en commun: un français souvent bien raffiné et des promesses à donner des tournis. Sauf qu’ils ne franchissent jamais, alors jamais, la ligne de l’action.

Indépendants, vraiment ?

Nos 60 ans se résument malheureusement à une théorie: «les deux bonbons». Ils sont là mais ils ne sont pas là.

Nous sommes indépendants mais dépendons totalement du triangle Europe-Chine-USA.

Nous sommes un pays démocratique avec un « Ye Mey » en monarque absolu.

Nous sommes un Etat de droit mais que pour certains.

Le VPM Tunda est en résidence surveillée mais libre de ses mouvements.

Le changement est là mais il n’est pas là. Même la Covid-19 est là mais personne ne veut y croire.

Et que dire de nos sauts-de-mouton ? Ils devraient être inaugurés aujourd’hui, on continue d’attendre. Sauf qu’ils étaient à 13, 6 ont disparu et sur les 7 restants, 2 sont fin travaux parmi lesquels 1 a perdu 2 de ses 4 bandes de circulation entre la conception et la réalisation.

60 ans après, nous devons cette fois-ci dresser nos fronts «longtemps courbés» et prendre pour de bon «le plus bel élan» pour un Congo différent. Un Congo dont le bonheur ne se limite pas qu’aux slogans et à une certaine catégorie des Congolais.

Nul n’est plus Congolais que les autres. La Constitution ne consacre-t-elle pas l’égalité de citoyens?

Dans la méditation, célébrons nos 60 ans pour repartir de plus belle.

Dandjes Luyila

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